Mercy-le-Haut 1914-1918

Mercy-le-Haut 1914-1918

1er au 20 août 1914

 

1er au 20 août: déclaration de guerre, les premiers combats autour de Mercy-le-Haut

 

 

Mercy-le-Haut se trouve à moins de 10 km de la frontière franco-allemande de l’époque (cette frontière correspond à l'actuelle limite entre les départements de Meurthe-et-Moselle et de Moselle). Or, en fin juillet 1914, le gouvernement Viviani avait décidé de replier les troupes françaises de couverture à plus de 10 km de la frontière, afin de bien marquer que le Kaiser était l'agresseur. En conséquence, Mercy-le-Haut et les villages voisins étaient laissés sans défense et ouverts aux troupes allemandes.

 

Dès le lendemain de la déclaration de guerre, des patrouilles de reconnaissance allemandes circulent dans la région. Jusqu'au 21 août, début de l'offensive française, aucun soldat français ne passera à Mercy-le-Haut et dans les villages situés plus à l'Est: Malavillers, Audun-le-Roman, Anderny, Fillières.

 

Les informations sur les événements survenus à Mercy-le-Haut entre le 1er et le 20 août sont limitées. Je n'ai pas trouvé de documents concernant directement Mercy-le-Haut (par exemple, le journal d'un habitant). J'ai donc choisi de donner les informations collectées sur les villages voisins. Par analogie, cela doit donner une assez bonne idée de la vie quotidienne à Mercy-le-Haut pendant ces 20 jours.

 

Nous disposons de 2 témoignages exceptionnels, concernant Fillières (6km au Nord de Mercy-le-Haut), et Xivry-Circourt (6 km à l'Ouest de Mercy-le-Haut):

 

1) Le livre de l'abbé Martin, de Fillières: "Fillières, la vie dans un village lorrain envahi et occupé"

2) Le journal de Charles Louis Bauchot, habitant de Xivry-Circourt: "Xivry-Circourt: un village lorrain occupé", publié par son petit-fils Michel Canton.

 

Dans ce qui suit :

 

  • Toutes les informations concernant Xivry-Circourt sont extraites du journal de Charles Louis Bauchot, habitant de Xivry-Circourt, et sont imprimées en italiques.
  • Toutes les informations concernant Fillières sont extraites du livre de l’abbé Martin.
  • Les informations concernant les autres villages sont d’origines diverses.

 

 

Vendredi 31 juillet

 

Xivry-Circourt : Dans la soirée, réception d’ordres individuels de mobilisation. Premiers départs. Passages de mobilisés dans la nuit.

 

Samedi 1er août

 

Dans toutes les communes de France, l'affiche blanche annonçant la mobilisation est placardée à la mairie : la mobilisation générale (de vingt à quarante-huit ans) est décrétée. Départ des hommes mobilisés qui rejoignent leurs unités.

 

Affiche mobilisation 1914.jpg

 

Dans la commune de Mercy-le-Haut (qui regroupe Mercy-le-Haut et Boudrezy), 30 hommes sont mobilisés (chiffre indiqué dans les carnets de Marguerite Lebrun, à confirmer avec les registres de l’époque). La commune comptant à cette époque 400 habitants, ce départ représente 7 à 8 % de la population.

 

Dans la région de Mercy-le-Haut, ces soldats partent dans des conditions difficiles : ils laissent leurs familles à moins de 10 km de la frontière franco-allemande de l’époque, donc dans une zone évacuée par l'armée française.

 

Le 22 août au soir, après la bataille et le recul des troupes françaises, Mercy-le-Haut sera derrière la ligne de front, en zone occupée. Les soldats mobilisés ne pourront plus revoir leurs familles avant novembre 1918.

 

Pour la commune de Mercy-le-Haut, 8 d’entre eux ne reviendront pas.

 

Lundi 3 août :

 

Fillières : On apprend que l’Allemagne déclare la guerre à la France. La nouvelle arrive probablement le matin du mardi 4 août (cf témoignage Abbé Martin à Fillières).

 

Mardi 4 août

 

Des patrouilles allemandes font des reconnaissances dans les villages autour de Mercy-le-Haut. Le plus souvent, il s’agit de cavaliers, notamment des uhlans. Cependant, à proximité immédiate de la frontière (moins de 4 ou 5 km), ce sont aussi des fantassins. Ce jour-là, sauf exception (Norroy-le-Sec), il n’y a pas de soldats français, les patrouilles allemandes font leurs missions de reconnaissance sans être inquiétées.

 

A titre d’exemple :

 

  • Audun-le-Romain, occupé par une compagnie d’infanterie allemande (250 hommes) venant de Fontoy, bientôt suivi par un régiment ( ?) qui restera 8 jours. Prise d’otages, réquisitions.
  • Sancy : passage de patrouille ennemie
  • Trieux : passage de patrouille allemande (cavalerie et infanterie)
  • Mairy : passage d’une patrouille de uhlans (cavaliers allemands)
  • Norroy-le-sec : des dragons allemands sont accrochés par un peloton ( ?) du 1er escadron du 10ème RCC (régiment de chasseurs à cheval français).
  • Mercy-le-Bas : reconnaissance de uhlans
  • Xivry-Circourt : halte de uhlans (Remarque: Charles Louis Bauchot n’en parle pas)
  • Mercy-le-Haut : pas d’information disponible. Il y a eu très probablement des passages de patrouilles allemandes sur la route d'Audun-le-Roman à Mercy-le-Bas

 

Mercredi 5 août

 

Fillières : l’Abbé Martin note dans son journal la présence de 4 ou 5 Allemands qui montent la garde près de Fillières.

Près de Joppécourt, le lieutenant Verrat (30ème Dragons français) livre un combat contre un escadron ennemi.

 

Jeudi 6 août

 

Fillières, l’Abbé Martin note dans son journal : « On entend distinctement une vive fusillade du côté de Mercy-le-Haut. Qu’est-ce là ? Les Français seraient déjà là ? La bataille se livrerait-elle déjà, si près de nous ? ».

Serrouville : l’abbé Moureaux, curé de Serrouville, est emmené par les Allemands comme otage. (il sera interné en Allemagne au camp de Holzminden (Brunswick) et libéré en 1916).

Xivry-Circourt : Charles Louis Bauchot voit de loin quelques éclaireurs allemands

 

Vendredi 7 août

 

Mercy-le-Haut: les Allemands rentrent pour la première fois dans le village (cf M Vautrin, instituteur). Le même jour, le sous-lieutenant Lagache, du 19ème Régiment de Chasseurs à Cheval, effectue une reconnaissance dans le village. Il est entouré par les Allemands. Il se fait jour en tuant un officier allemand et en fendant la tête du sous-officier d'un coup de sabre. Il peut rallier et ramener tous ses hommes. Le sous-lieutenant Lagache est blessé à la poitrine d'un coup de lance, son brigadier Fruchart en reçoit deux et le chasseur Hermant a le bras traversé.

Fillières : Environ 1500 cavaliers allemands pénètrent dans Fillières. (Ils sont coiffés de la Schapska). Réquisitions de nourriture. 3 otages civils, dont le maire et le curé. Un otage est accusé d’avoir tiré sur les Allemands et fusillé.

Bouligny : Accrochage à Bouligny

Serrouville : 2 otages emmenés.

Morfontaine : Les Allemands mettent le feu. 5 habitants meurent dans l’incendie de l’église.

Xivry-Circourt : Selon Charles Louis Bauchot, quelques patrouilles allemandes, petite fusillade (les Allemands en bas, les Français en haut). Journée calme. Vers 16h00, arrivée 12 hommes et un officier allemands. « Polis et convenables ». Retournés sur Preutin en fin de journée.

 

D’une façon générale, il n’y a pas de grandes concentrations allemandes, mais des patrouilles sillonnent la région.

 

Samedi 8 août

 

Mercy-le-Bas et Saint-Supplet: Une patrouille du 19ème RCC (régiment de chasseurs à cheval français) est attaquée par des uhlans. A la sortie de Saint-Supplet, le lieutenant Grellet charge le peloton ennemi qui lui barre la route, tue l'officier allemand, bouscule le peloton, mais il tombe percé de balles et est achevé à coups de lances.

Affleville : accrochage du 8eme BCP (bataillon de chasseurs à pied français) avec des uhlans. Représaille des uhlans qui incendient le village.

Xivry-Circourt : le matin, passage de quelques patrouilles allemandes. Vers 16h00, arrivée de dragons, hussards et artilleurs français, qui cantonnent sur place. Général de Brigade Hoffmacker (Français). 70 chevaux.

 

Dimanche 9 août

 

 

 

Occupation village lorrain.png
 

Un détachement allemand occupe un village lorrain: bivouac, inventaire des armes

  

Bazailles : des dragons allemands font des réquisitions

Fillières : réquisitions par les Allemands. On entend le canon du côté de Longuyon.

Joppécourt : Accusations de francs-tireurs par les Allemands. Le maire est fusillé.

 

Lundi 10 août

 

Xivry-Circourt : départ des troupes françaises pour les bois de Mangiennes. On entend une forte canonnade. Passage de nombreux convois (qui pillent la maison Reny).

 

Mardi 11 août

 

Fillières : arrivée de nouvelles troupes allemandes, et de soldats du RIR 3 (3ème régiment d'infanterie de réserve allemand) qui gardent la voie ferrée. Réquisitions. Arrivée du Jäger zu Pferd 8 (le 8ème régiment de chasseurs à cheval allemand).

Mercy-le-Bas : présence d’importantes forces de cavalerie allemande.

Bazailles : les dragons allemands du 23ème bataillon occupent Bazailles après la bataille de Petit-Xivry. Accusation de présence de francs-tireurs. Incendie, 26 habitants tués (dont Alfred Navel, 75 ans)

Xivry-Circourt : retour des troupes françaises. Blessés installés à la mairie et l’église. Passage avions allemands, tirs de fusils.

Mercy-le-Haut : installation d’un détachement de la 6ème division de cavalerie allemande (KD 6) (information non confirmée).

 

 

 

Patrouille cavaliers.png

Patrouille de uhlans, lieu non connu

 

 

Mercredi 12 août

 

Fillières : départ des Allemands coiffés de la Schapska (uhlans ?).

Xivry-Circourt : Un habitant d’une commune voisine est accusé d’espionnage et fusillé par les Français. Entre 17h00 et 22h00, passage de chasseurs à pied français revenant des combats de Mangienne et Pillon.

 

Jeudi 12 août

 

Xivry-Circourt : Arrivée de dragons et artilleurs français.

 

Vendredi 14 août

 

Fillières : départ des Jäger zu Pferd (chasseurs à cheval allemands)

Xivry-Circourt : les dragons et artilleurs français partent le matin et reviennent dans la journée.

 

Samedi 15 août

 

Fillières : arrivée de 150 cavaliers allemands

Xivry-Circourt : départ des dragons et artilleurs français, passage de convois et cavalerie, puis arrivée d’une compagnie d’infanterie (française)

 

Cavaliers français.jpg

Patrouille de cavaliers français. Lieu inconnu.

Carte postale d'époque

 

Dimanche 16 août

 

Fillières : Un groupe de soldats allemands, équipé de TSF, passe à Fillières pour aller s’installer à Mercy-le-Haut.

 

Lundi 17 août

 

Mardi 18 août

 

Fillières : arrivée de 600 cavaliers allemands qui cantonnent dans le village.

 

Mercredi 19 août

 

Xivry-Circourt : passage de militaires venus de pays voisins qui cherchent de la nourriture (Français ou Allemands? Charles Louis Bauchot ne le précise pas).

Un avion français signale à l'état-major 2 brigades de cavalerie et artillerie à la lisière du bois entre Murville et Malavillers (il s'agit de la 6ème division de cavalerie allemande (KD6)).

 

Jeudi 20 août

 

Mercy-le-Haut: un avion français lâche un obus de 155 sur un groupe de cavaliers allemands (l'obus n'explose pas).

Malavillers: un autre avion français fait tomber 3000 fléchettes sur des cavaliers allemands de la 6ème division de cavalerie (la KD6).

Domprix : Patrouille allemande à Domprix, combat avec le 10ème RCC (régiment de chasseurs à cheval français). (Côté Allemand, il s’agit probablement du Jâger zu Pferd 13 (13ème régiment de chasseurs à cheval). Une photo allemande montre le Oberleutnant von Werner recevant des soins à Mercy-le-Bas)

 

Patrouille 20 aout.png

 Patrouille allemande faisant une halte à Mercy-le-Bas le 20 août 1914, probablement juste après un accrochage avec une patrouille française à Domprix.

 

 

Fillières : on entend le canon

Xivry-Circourt : passage de 3 avions qui reçoivent une vive fusillade

 

Vendredi 21 août

 

Fillières : départ de troupes allemandes vers 2 h pour Domprix. 12h00 : passage de fuyards allemands, cyclistes et cavaliers (S’agit-il de troupes qui ont accroché la 6ème division de cavalerie française à Bouligny et Piennes ?). Vers 15h00, on entend mitrailleuses et canon. Fumée sur la route de Mercy-le-Haut (il s’agit probablement du combat du bois de Boudrezy.

Xivry-Circourt : matin : départ des troupes. 13h00 : arrivée de chasseurs à cheval français. Coups de fusils du côté de Xivry. Arrivée de nombreuses troupes françaises. En fin de journée, combat au bois de Boudrezy. Soir : quelques prisonniers allemands sont ramenés. Beaucoup de troupes cantonnent dans le village.

 

NOTE: le chapitre suivant donne une description beaucoup plus détaillée du combat du bois de Boudrezy.

 

Samedi 22 août

 

Xivry-Circourt. Charles Louis Bauchot voit passer de nombreuses troupes, entend canonnade vers Audun à partir de 8h00. 12h00 : arrivée d’ambulances. 14h00 : le canon se rapproche. Une division de cavalerie française (la 6ème DC) évolue près du village. Vers 16h00, elle quitte le village au galop, direction Spincourt. Arrivée de nombreux blessés. 17h00 : M Bauchot se décide à partir, mais une batterie d’artillerie allemande tire sur la route de Xivry-Circourt à Spincourt. Abandon de la charrette, retour au village. La fusillade cesse un instant. Puis reprise de la fusillade, entrée des soldats allemands dans le village.

 

NOTE: Ce paragraphe est un extrait du journal de Charles Louis Bauchot publié par son arrière-petit-fils Michel Canton. Les chapitres suivants donnent une description beaucoup plus détaillée des combats du 22 août.

 

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02/11/2013

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